Mobilité dans les QPV : quels freins et quelles solutions pour avancer ?

Dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV), la mobilité du quotidien est souvent difficile. Pour les 5,3 millions de personnes qui y vivent, se déplacer facilement pour aller travailler, se soigner ou accéder à des services de base n’est pas toujours possible. Ces obstacles renforcent les inégalités sociales. Pourtant, des solutions existent pour faciliter les déplacements dans ces quartiers. 

Les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV) sont des zones où l’État et les collectivités locales concentrent des moyens pour réduire les inégalités. En France métropolitaine, en Martinique et à La Réunion, on compte 1 514 quartiers prioritaires répartis dans 859 communes. Ces territoires cumulent souvent des difficultés en matière d’emploi, de logement, d’éducation, mais aussi de mobilité. C’est pourquoi ils sont au cœur des enjeux liés aux déplacements du quotidien.

Des déplacements quotidiens sous contraintes dans les quartiers prioritaires

Pouvoir se déplacer librement est essentiel pour accéder à un emploi, suivre une formation, faire ses courses ou aller chez le médecin. Mais dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV), cette mobilité est souvent plus difficile, à cause de plusieurs obstacles qui se cumulent. Plus de trois jeunes sur quatre ont déjà renoncé à un emploi ou à une formation en raison de difficultés de mobilité (source : baromètre Apprentis d’Auteuil 2024).

Un usage limité de la voiture

Dans les QPV, beaucoup d’habitant·es n’ont pas accès à une voiture. Près de 45 % des ménages n’en possèdent pas, contre seulement 18,5 % dans les autres quartiers urbains (source : SDES-Insee). Ils sont aussi moins nombreux à avoir le permis de conduire. Selon les zones, on compte jusqu’à trois fois moins de titulaires du permis.

Le coût d’achat, d’entretien et d’assurance d’un véhicule est aussi un frein important pour des populations dont le revenu médian est deux fois moins élevé que dans le reste du territoire.

Des déplacements plus lents

Les habitant·es des QPV passent autant de temps à se déplacer que les autres urbains, mais ils parcourent moins de distance. Dans les villes de taille moyenne (50 000 à 200 000 habitants), une personne vivant en QPV parcourt 15 km par jour, contre 26 km pour le reste de la population, pour un temps de trajet équivalent d’environ 1h10 (source : Cerema).

Cette différence s’explique par un accès plus limité aux moyens de transport rapides et efficaces. Pour se déplacer, les habitants des QPV utilisent davantage les transports en commun ou marchent. La marche représente ainsi 45,7 % de leurs déplacements, contre 22 % dans les autres quartiers urbains (source : SDES).

Lever les freins à la mobilité active dans les QPV

Même si de plus en plus de personnes se déplacent à vélo en France, cette pratique reste encore peu développée dans les quartiers prioritaires. Seuls 1,9 % des déplacements y sont faits à vélo, contre 2,8 % en moyenne dans l’ensemble du pays (source : SDES).

Peu de vélos, mais un usage plus intensif

Peu de foyers dans les quartiers prioritaires sont équipés d’un vélo. 84 % des ménages n’en possèdent pas, contre 67 % dans les autres quartiers urbains  (source : SDES). Pourtant, quand les habitant·es des QPV ont un vélo, ils l’utilisent beaucoup : plus de 1 sur 5 s’en sert tous les jours ou presque, soit trois fois plus souvent que la moyenne (7,9 % hors QPV).

Des quartiers avec des coupures urbaines importantes

Dans 90 % des QPV, une grande route, une voie ferrée ou un cours d’eau crée une barrière qui rend les déplacements plus compliqués (source : Cerema). Ces coupures rendent les trajets à pied et à vélo difficiles voire dangereux, surtout quand il n’y a pas d’aménagement prévu pour les franchir en toute sécurité.

Des freins culturels et genrés

Par ailleurs, le vélo y est surtout utilisé par des hommes, soit pour le travail – notamment dans les métiers de la livraison – soit dans un cadre sportif, comme le BMX ou le VTT. Les femmes, elles, sont moins nombreuses à faire du vélo, notamment parce qu’elles n’ont pas toujours appris à en faire ou ne se sentent pas en sécurité. Dès l’adolescence, cette différence se creuse, et les femmes se déplacent davantage à pied ou en transports en commun.

Un espace public pas toujours adapté aux mobilités actives

L’aménagement de l’espace public ne facilite pas toujours les déplacements à pied ou à vélo dans les quartiers prioritaires. Les pistes cyclables sont souvent absentes ou mal reliées, et les trottoirs peuvent être étroits, abîmés ou peu sécurisés. De plus, les transports en commun sont souvent saturés et ne couvrent pas toujours les horaires de travail décalés, ce qui complique fortement les déplacements de nuit ou tôt le matin. Résultat : sans voiture, les déplacements sont ainsi très contraints.

Des solutions pour une mobilité plus inclusive et durable

Améliorer la mobilité dans les quartiers prioritaires ne se résume pas à ajouter quelques pistes cyclables ou aménager les trottoirs. Il est nécessaire de transformer en profondeur l’espace public, lever les obstacles économiques et culturels, et accompagner les usages. De nombreuses actions existent déjà, montrant que des changements concrets sont possibles.

Repenser l’aménagement pour mieux partager l’espace

Dans de nombreux QPV, la voiture occupe encore une place centrale, au détriment des piétons et des cyclistes. Pour redonner toute leur place aux mobilités actives, certaines collectivités engagent des réaménagements : création de zones 30, apaisement de la circulation, végétalisation, transformation des grands axes en rues plus sûres et accessibles.

Supprimer les coupures urbaines est aussi essentiel. Il peut s’agir de créer des passerelles, d’aménager des traversées sécurisées, ou de mieux relier les quartiers entre eux et au reste de la ville grâce à des continuités piétonnes et cyclables.

Encourager la pratique du vélo en lui donnant plus de visibilité au sein des QPV, mobilise plusieurs acteurs locaux engagés : les bailleurs sociaux aménagent des espaces sécurisés pour les vélos, les associations de quartier organisent des ateliers d’autoréparation en pied d’immeuble ou encore des balades urbaines en famille et, ainsi, participent au désenclavement des QPV.

Faciliter l’usage du vélo et de la marche au quotidien

La marche reste le mode le plus utilisé dans les QPV, mais le vélo a un fort potentiel. C’est un moyen de transport économique, bon pour la santé et permettant de parcourir de plus longues distances. Mais sans accompagnement, il reste difficile pour beaucoup d’habitant·es de se (re)mettre en selle.

Dans plusieurs territoires, des dispositifs permettent aujourd’hui de lever les freins économiques. Locations longue durée à prix solidaire, aides à l’achat, mise à disposition de vélos d’occasion remis en état : autant de leviers pour franchir le premier pas. Des ateliers de réparation peuvent également être proposés dans les quartiers pour permettre de remettre en circulation des vélos inutilisés.

Mais avoir un vélo ne suffit pas toujours. Beaucoup de femmes ou de jeunes n’ont jamais appris à en faire ou ont perdu confiance. Des ateliers d’apprentissage, des séances encadrées en circulation et de remise en selle aident à surmonter ces blocages. Ces actions sont essentielles pour toucher celles et ceux qui restent éloignés de la mobilité et renforcer leur autonomie.

Vélo-Égaux : un accompagnement concret pour se déplacer à vélo

Parmi les solutions qui facilitent concrètement la mobilité, le programme Vélo-Égaux se distingue par son approche complète et accessible. Il s’adresse aux personnes en situation de précarité qui veulent se déplacer plus facilement au quotidien et gagner en autonomie.

Grâce à un accompagnement personnalisé, les bénéficiaires peuvent apprendre à se déplacer à deux roues en toute sécurité, à effectuer des réparations simples et accéder à un vélo.

Pour aller plus loin

Vous souhaitez orienter une personne vers le programme Vélo-Égaux ?

C’est simple et gratuit ! Le programme est entièrement pris en charge pour les bénéficiaires. Il s’adresse aux personnes en situation de précarité qui rencontrent des difficultés financières et ont besoin d’une solution de mobilité pour leurs déplacements quotidiens.

– Vous êtes un particulier ? Vous pouvez vous inscrire directement ou orienter un proche.
– Vous travaillez dans le social, l’insertion ou l’accompagnement des personnes en situation de précarité ? Vous pouvez orienter vos bénéficiaires vers le programme.

Rendez-vous sur veloegaux.fr pour vérifier si votre territoire est couvert par le programme et remplir le formulaire d’inscription, ou contactez directement la coordination locale de votre territoire par téléphone.